Le Tribunal de commerce est une institution à part dans le paysage judiciaire français car il n’est composé que de juges non professionnels, à savoir des dirigeants d’entreprises ou des commerçants.
Le Conseil de Prud’hommes est aussi une juridiction composée de juges non professionnels, mais, lorsqu’il y a égalité de voix lors du délibéré entre les deux juges employeurs et les deux juges salariés, l’affaire est rejugée en « audience de départage », laquelle voit la composition du Conseil augmentée d’un « juge départiteur », ce juge départiteur étant un juge professionnel qui vient du Tribunal de Grande Instance.
Le Tribunal de commerce quant à lui ne voit aucun juge professionnel interférer dans ses décisions.
Seul le représentant du ministère public peut donner son avis (dans certaines affaires), avis que le tribunal n’est pas obligé de suivre.
Cela étant, après jugement, il y a toujours la Cour d’appel pour faire intervenir un juge professionnel lorsque cette voie de recours est mise en œuvre.
L’origine des tribunaux de commerce remonte à l’empire romain.
Les corporations de marchands décidèrent d’élire parmi eux des consuls (la « juridiction consulaire » est synonyme aujourd’hui de « tribunal de commerce »), et que soient appliquées aux litiges entre commerçants des règles moins formalistes que celles du droit romain.
Cette création se répandit ensuite dans toute l’Europe.
C’est sous la Révolution française que la juridiction consulaire prit le nom de Tribunal de commerce.
La composition du tribunal de commerce
Chaque tribunal de commerce est composé de trois juges au moins. Les plus importants des tribunaux de commerce, comme celui de Paris par exemple, comportent plusieurs chambres.
Les juges des tribunaux de commerce sont des commerçants et des dirigeants d’entreprises. Ils sont désignés par une élection à deux degrés auprès de leurs pairs. Les juges sont en effet élus par un collège électoral composé des délégués consulaires et des juges et anciens juges de tribunaux de commerce.
Les délégués consulaires sont eux-mêmes élus par et parmi les commerçants inscrits au registre du commerce et des sociétés, les artisans inscrits au répertoire des métiers, les cadres et dirigeants d’entreprises, et par certaines personnes assimilées.
Pour être candidat, il faut avoir 30 ans et justifier de cinq ans d’expériences.
Les juges consulaires sont élus en général pour une période de quatre ans (après un premier mandat probatoire de deux ans). Ils peuvent faire jusqu’à quatre mandats successifs.
Mais, quelle que soit l’expérience professionnelle, on ne s’improvise pas juge.
Les juges nouvellement élus bénéficient donc, depuis 2009, d’une formation délivrée par L’Ecole nationale de la magistrature, laquelle assure également la formation continue pour l’ensemble des juges consulaires. Cette formation continue est d’autant plus nécessaire qu’à notre époque les lois changent avec chaque majorité politique, c’est-à-dire environ tous les cinq ans.
La direction du tribunal de commerce
Les juges élisent le juge-président pour quatre ans. Le juge-président doit avoir exercé au moins six ans en tant que juge. Le premier président de la Cour d’appel peut cependant accorder une dérogation s’il n’est pas possible de trouver une personne répondant à ces conditions.
Le juge-président désigne le vice-président et les présidents de chambres. Il dresse par ordonnance la liste des juges pouvant exercer les fonctions de juge-commissaire.
Le jugement et l’audience
Hormis les cas où la décision peut être rendue par un seul juge, la formation de jugement est collégiale et comprend normalement trois juges, nombre pouvant être porté à cinq.
La formation de jugement est présidée par le juge-président, le vice-président, un président de chambre ou, à défaut, un juge ayant au moins deux ans d’ancienneté.
En dehors des cas où l’affaire est examinée en chambre du conseil (par exemple les audiences consécutives à une déclaration de cessation des paiements, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire), l’audience est publique, c’est-à-dire que tout un chacun peut y assister. Mais, pour être avocat spécialiste en droit commercial et droit des affairesdepuis plusieurs dizaines d’années, on peut affirmer ici que cet accès libre à la salle d’audience est tout à fait théorique (hormis pour les audiences de référés).
En effet, la quasi-totalité des affaires se plaide en très petit comité dans le bureau du juge chargé d’instruire l’affaire, le juge rapporteur, lequel transmettra son analyse et ses impressions aux deux autres pour un délibéré (censé être) commun. Ceci dit, afin de sauvegarder les apparences, quelques juges nous demandent de laisser la porte de leur bureau ouverte pendant les plaidoiries….
La compétence du tribunal de commerce
La compétence territoriale
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Comme pour toutes les juridictions, le tribunal de commerce territorialement compétent est celui du défendeur (celui qui reçoit une convocation en justice). Cette règle comporte cependant, un certain nombre d’exceptions. Ainsi, en cas de litige en matière contractuelle, le tribunal territorialement compétent ne sera pas nécessairement celui du défendeur, mais pourra être celui du lieu où la principale prestation a été exécutée. Ca peut, par exemple, être le lieu de livraison de la chose dans un contrat de vente.
D’autre part, cette règle classique de la compétence territoriale du tribunal du lieu du défendeur peut aussi être contournée par les clauses attributives de compétence par lesquelles, dans un contrat, on choisit le tribunal compétent en cas de litige.
Imposées par des professionnels, sociétés ou autres, ces clauses peuvent poser problème aux particuliers notamment parce qu’elles pourraient les obliger à un déplacement coûteux.
Fort heureusement, cette clause ne peut être valide que si les intéressés ont tous deux la qualité de commerçants, et qu’elle apparaît de façon très nette sur le contrat. Ainsi, une clause attributive de compétence territoriale serait réputée non-écrite si elle a été faite entre un non-commerçant et un commerçant
La compétence matérielle
La compétence du tribunal de commerce est déterminée par les articles L.721-3 et L.721-4 du Code du commerce. Il est compétent pour statuer sur les contestations entre les commerçants, entre les sociétés commerciales, entre les établissements de crédits, ou tout ce qui concerne les actes decommerce. D’autre part, ce sont les tribunaux de commerce qui statuent entre autres dans les procédures collectives, c’est-à-dire notamment, le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire.
L’appel des jugements du tribunal de commerce
Le tribunal de commerce statue à charge d’appel si le montant du litige dépasse 4 000€. Les recours contre une décision du tribunal de commerce sont portés devant la Cour d’appel territorialement compétente. Si le montant du litige est inférieur à 4 000€ la décision est rendue en dernier ressort (sauf exercice d’un pourvoi en cassation, mais cela reste très théorique car cette voie est coûteuse).
Le tribunal de commerce est régulièrement sous les feux de l’actualité, et souvent critiqué.
On lui reproche quelquefois de servir les intérêts de certains milieux d’affaires influents ; pour autant le taux d’appel de ses jugements est faible.
La critique est donc excessive ; et quand bien même elle mériterait d’être entendue dans un nombre infime de cas, lorsqu’on est assisté d’un avocat vigilant et combattif, il ne peut y avoir d’arrangements douteux.
Maître Gérard DOUKHAN, Avocat spécialiste en droit commercial et droit des affaires, représente et défend ses clients devant les tribunaux de commerce de la France entière depuis 40 ans.
Contact : 01.42.65.50.64
Article mis en ligne en mai 2019.
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