Le bail commercial comprend quasiment toujours une clause résolutoire (sinon il a été bricolé et n’a pas été rédigé par un avocat spécialiste en droit commercial) permettant au bailleur de résilier de plein droit le contrat en cas de manquement du locataire à ses obligations, notamment le paiement des loyers.
La mise en œuvre de cette clause suit une procédure stricte, essentiellement encadrée par l’article L 145-41 du Code de commerce, lequel donne cependant au locataire plusieurs moyens pour se défendre et tenter d’échapper à la résiliation de son bail
- LA MISE EN ŒUVRE DU COMMANDEMENT DE PAYER
A- Conditions de validité du commandement
Pour que la clause résolutoire produise effet, il faut qu’un commandement de payer soit délivré au locataire. Ce commandement doit respecter les conditions suivantes
- Forme de l’acte: Le commandement doit être délivré par acte extrajudiciaire, c’est-à-dire par huissier ou commissaire de justice, et non par lettre recommandée (« Le commandement qui est un préalable à la mise en jeu d’une clause résolutoire d’un bail commercial ne peut pas être délivré par lettre recommandée AR ; il doit l’être par acte extrajudiciaire. »)
« La SCI qui entend faire jouer la clause résolutoire de plein droit doit d’abord faire délivrer au locataire un commandement de payer (C. com. art. L 145-41, al. 1) par acte extrajudiciaire, c’est-à-dire par acte d’huissier (Cass. 3 e civ. 21-12-2017 n° 16-10.583 FS-PBI : RJDA 4/18 n° 302), ou de commissaire de justice. »)
- Contenu du commandement: Il doit indiquer de manière précise les manquements reprochés au locataire et le montant exact des sommes réclamées, afin que le locataire puisse y remédier, (« Le commandement doit indiquer le montant des loyers dus (Cass. 3 e civ. 6-1-1982 n° 80-12.869, Garcia c/ Athias).
« Est irrégulier le commandement portant sur une somme globale ne permettant pas au locataire d’apprécier le bien-fondé du commandement » (Cass. 3 e civ. 10-2-1988 n° 86-18.453 […] Cass. 3 e civ. 19-7-1988 n° 87-12.554). »)
« Pour permettre cette régularisation, le commandement de payer doit informer clairement le locataire du montant qui lui est réclamé et être suffisamment précis pour permettre au preneur d’identifier les causes des sommes réclamées et de vérifier la prise en compte des paiements effectués. »
- Mention du délai: À peine de nullité, le commandement doit mentionner le délai d’un mois dont dispose le locataire pour remédier au manquement (« Toute clause d’un bail commercial prévoyant la résiliation de plein droit du bail ne peut produire effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai (C. com. art. L 145-41) »)
« À peine de nullité, le commandement doit mentionner le délai d’un mois minimum dont dispose le locataire pour payer ; un délai de trente jours, conforme à la clause, est irrégulier (Cass. 3 e civ. 11-12-2013 n° 12-22.616 : RJDA 3/14 n° 204). »
- Clarté et absence d’ambiguïté: Il doit éviter toute mention contradictoire sur les délais, sous peine de nullité (« Ce commandement a été annulé car ses mentions étaient de nature à créer, dans l’esprit du locataire, une confusion l’empêchant de prendre la mesure exacte des injonctions faites et d’y apporter la réponse appropriée dans le délai requis. »)
- Délivrance à la bonne personne: L’irrégularité liée à l’auteur ou au destinataire du commandement ne peut être régularisée ultérieurement (« L’irrégularité de fond relative à l’auteur ou au destinataire du commandement et affectant la validité de celui-ci n’est pas susceptible de régularisation » ) .
Pour les bailleurs, compte tenu de toutes ces règles très rigoureuses, se faire accompagner par un avocat en droit commercial à Paris, spécialiste des baux commerciaux et des fonds de commerce, est une sécurité essentielle.
Maitre Gérard DOUKHAN donnera des instructions précises au commissaire de justice et n’hésitera pas à lui demander de refaire l’acte s’il considère que celui-ci ne remplit pas toutes les conditions légales et risque ainsi d’être annulé.
B- Les effets du commandement
Après la délivrance du commandement, le locataire dispose d’un délai d’un mois pour s’exécuter.
Si, passé ce délai, il n’a pas régularisé la situation (par exemple, il n’a pas payé les loyers), la clause résolutoire produit effet de plein droit et la résiliation du bail peut être constatée judiciairement (« La résiliation de plein droit ne peut intervenir qu’une fois que le délai imparti au locataire pour réparer l’infraction est expiré. L’expiration du délai imparti par la mise en demeure est une condition de recevabilité de l’action tendant à faire constater la résiliation de plein droit (Cass. 3 e civ. 19-3-1986 : Bull. civ. III n° 32). »)
(« Si le locataire a obtempéré à la mise en demeure dans le délai prévu, la clause résolutoire ne joue plus (Cass. 3 e civ. 3-7-1970 : Bull. civ. III n° 467 ; Cass. 3 e civ. 3-11-2005 n° 04-16.256 : RJDA 3/06 n° 240). »)
- LES MOYENS DE DEFENSE DU LOCATAIRE
Face à un commandement de payer visant la clause résolutoire, le locataire dispose heureusement de plusieurs voies pour se défendre et tenter d’échapper à la résiliation du bail commercial.
Il faut dire cependant que, dans la réalité, pour s’en sortir au mieux, ce qui n’est pas une mince affaire, il est indispensable d’être assisté par un avocat spécialiste en droit commercial certifié.
Et s’il bénéficie d’une expérience en la matière de plus de 30 ans, comme Maitre Gérard DOUKHAN, c’est évidemment une garantie supplémentaire…
A – La contestation de la régularité du commandement
Le locataire peut invoquer devant le Juge l’irrégularité du commandement pour en obtenir l’annulation :
Défaut de forme (lettre recommandée au lieu d’acte d’huissier) : La délivrance par lettre recommandée est une cause de nullité (« Le commandement qui est un préalable à la mise en jeu d’une clause résolutoire d’un bail commercial ne peut pas être délivré par lettre recommandée AR ; il doit l’être par acte extrajudiciaire. »)
Commandement imprécis ou ambigu : En cas de mentions contradictoires sur les délais ou de manque de précision sur la créance, la nullité peut être encourue (« Ce commandement a été annulé car ses mentions étaient de nature à créer, dans l’esprit du locataire, une confusion l’empêchant de prendre la mesure exacte des injonctions faites et d’y apporter la réponse appropriée dans le délai requis. ») .
Montant global non ventilé : Un commandement portant sur une somme globale sans ventilation claire peut être jugé irrégulier (« Est irrégulier le commandement portant sur une somme globale ne permettant pas au locataire d’apprécier le bien-fondé du commandement. »).
B – La régularisation dans le délai imparti
Le principal moyen pour le locataire d’échapper à la résiliation est de régulariser sa situation dans le délai d’un mois suivant la signification du commandement :
- Paiement des sommes dues: Le paiement intégral des sommes réclamées dans le délai suspend l’effet de la clause résolutoire, qui ne joue plus (« Si le locataire a obtempéré à la mise en demeure dans le délai prévu, la clause résolutoire ne joue plus » )
(« Le paiement dans le délai imparti doit être fait au bailleur ou à la personne désignée pour recevoir le paiement (C. civ. art. 1342-2, al. 1 ; cf. Cass. civ. 5-3-1997 : RJDA 5/97 n° 616) »).
- Paiement partiel et contestation du solde:Attention !
Le commandement reste valable pour la partie non contestée de la dette (« En revanche, le commandement portant mention d’une somme supérieure à la dette véritable reste valable à due concurrence de la partie non contestée par le locataire (Cass. 3 e civ. 2-7-1970 n° 69-10.872 : Bull. civ. III n° 461 ; Cass. 3 e civ. 27-10-1993 n° 1539 : RJDA 12/93 n° 1006, 1 e esp. »)
C – La demande de délais judiciaires et la suspension de la clause résolutoire
C’est le cas le plus fréquent lorsqu’on n’a pas payé l’arriéré de loyers ou mis fin à l’infraction dans le délai d’un mois.
Mais c’est la partie la plus difficile à jouer, car les juges sont rigoureux en la matière. Ils considèrent que si on accorde des délais de paiement à un commerçant dont on sait qu’il ne pourra pas les respecter, on ne fait qu’aggraver sa dette et le préjudice de son bailleur.
Ceci étant précisé, le locataire peut solliciter du juge l’octroi de délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire, tant que la résiliation n’a pas été constatée par une décision de justice ayant acquis « l’autorité de la chose jugée ».
- Pouvoir du juge: Le juge peut accorder des délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire si le locataire en fait expressément la demande (« il résulte de l’article L. 145-41, alinéa 2, du code de commerce, que les juges, saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1244 du code civil, peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée » )
- (« La demande de suspension des effets de la clause résolutoire doit être formulée « dans les formes et conditions prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du code civil ». Le locataire doit donc commencer par formuler une demande, non seulement de délais, mais aussi de suspension des effets de la clause, le juge ne pouvant se saisir d’office ni l’accorder d’office » )
- Conséquences du non-respect des délais accordés: Si le locataire ne respecte pas les délais judiciaires accordés, la clause résolutoire est définitivement acquise, même en cas de mauvaise foi du bailleur (« Il résulte de l’article L 145-41 du Code de commerce que, lorsqu’une ordonnance de référé passée en force de chose jugée a accordé au titulaire d’un bail à usage commercial des délais pour régler un arriéré de loyers et le loyer courant en suspendant la réalisation de la clause résolutoire, le non-respect de ces délais rend la clause définitivement acquise sans que la mauvaise foi de la bailleresse à s’en prévaloir puisse y faire obstacle. Cass. 3 e civ. 26-10-2023 n° 22-16.216 FS-B » )
(« le non-respect de ces délais rend la clause définitivement acquise malgré la mauvaise foi du bailleur à s’en prévaloir (Civ. 3 e , 26 oct. 2023, n o 22-16.216, D. 2023. Actu. 1902 ; BRDA 22/23, inf. 14). ») [
D – Autre moyen de défense : la contestation sur la bonne foi du bailleur
Le locataire peut également tenter de démontrer que le bailleur a agi de mauvaise foi, notamment si le commandement a été délivré dans des conditions rendant la régularisation impossible (« En outre, elle ne peut jouer que si le bailleur la met en œuvre de bonne foi, le juge saisi d’une demande d’acquisition de clause résolutoire devant, lorsque le locataire invoque la mauvaise foi du bailleur, faire une recherche sur ce point (Cass. 3 e civ. 10-11-2010 n° 09-15.937 FS-PB : RJDA 3/11 n° 221 ).
« La mauvaise foi du bailleur dans la délivrance du commandement paralyse les effets de l’acte et il est généralement considéré qu’est de mauvaise foi un bailleur qui délivre sa mise en demeure dans des conditions telles que le locataire ne pourra pas à l’évidence mettre fin à l’infraction qui lui est reprochée dans le délai imparti (Cass. 3 e civ 15-12-1976 n° 75-15.377 : Bull. civ. III n° 465 »)
Une jurisprudence désormais constante de la Cour de cassation impose au juge, s’il y est invité, de rechercher si la clause résolutoire n’a pas été mise en œuvre de mauvaise foi : (( Civ. 3e, 23 juin 2015, n° 14-12.606″ )
Néanmoins, si toutes les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies, la mauvaise foi du bailleur ne fera pas échec à la résiliation dès lors que le locataire n’a pas respecté le délai ou les échéances judiciaires qui lui ont été accordées (« le non-respect de ces délais rend la clause définitivement acquise sans que la mauvaise foi de la bailleresse à s’en prévaloir puisse y faire obstacle. »)
E- La contestation du montant de la somme réclamée
Le locataire peut contester le bien-fondé de la somme réclamée, en produisant la preuve de ses paiements ou en contestant la dette « Il résulte de l’article 1315 devenu 1353 du code civil qu’il appartient au preneur d’établir qu’il s’est libéré du paiement du loyer contractuellement dû entre les mains de son bailleur. »
Face à ces problématiques complexes, le recours à l’avocat spécialiste en droit commercial est un gage de qualité. On peut être assuré par exemple que celui-ci saura lire et interpréter le bilan d’une entreprise. Non, ce n’est pas le cas de tous les avocats…
Maître Gérard Doukhan met à votre service son expertise et son expérience pour vous guider, défendre vos droits et tout mettre en œuvre pour aller vers le succès.
- CAS PARTICULIERS ET AUTRES MOYENS DE DEFENSE
A – Le paiement par un tiers
Le paiement effectué par la caution ou tout tiers pour le compte du locataire a un effet libératoire et empêche le bailleur de se prévaloir de la clause résolutoire (« Le paiement fait par la caution du locataire interdit au bailleur de se prévaloir de la clause résolutoire (CA Colmar 15-11-2010 n° 09-03606 : PA 2011 n° 83 p. 10 note Perrin, solution reposant sur l’ancien article 1236 du Code civil tenant pour libératoire le paiement par la caution, transposable à l’article 1342-1 qui prévoit que le paiement peut être fait par toute personne). ») .
B – Procédures collectives
En cas de procédure collective, des règles spécifiques s’appliquent, et la résiliation de plein droit peut être constatée sans commandement de payer pour les loyers échus postérieurement au jugement d’ouverture « Lorsque le locataire de locaux commerciaux est en liquidation judiciaire, le bailleur peut faire constater la résiliation de plein droit du bail pour non-paiement des loyers échus après l’ouverture de la procédure, sans avoir à adresser au préalable un commandement de payer. »
CONCLUSION
La procédure de mise en œuvre de la clause résolutoire dans le bail commercial est strictement encadrée, et la vigilance s’impose tant du côté du bailleur que du locataire. Si le bailleur doit respecter scrupuleusement la procédure, le locataire dispose quant à lui de plusieurs moyens pour contester, régulariser ou solliciter des délais et, ainsi, éviter la résiliation du bail.
Mais encore faut-il les connaitre, puis les appliquer dans les règles de l’art.
L’assistance d’un avocat spécialiste en matière de baux commerciaux est évidemment indispensable.
Maître Gérard Doukhan, avocat en droit commercial à Paris, spécialiste reconnu des baux commerciaux et des fonds de commerce, accompagne ses clients avec une expertise pointue sur ces sujets complexes, qui posent bien des problèmes aux bailleurs et aux locataires commerciaux.
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Article mis en ligne en septembre 2025.
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